Détenues

Épisode

4

Gabrielle (1/3)

Dans cette série, nous donnons la parole aux femmes détenues. Elles représentent 4%de la population carcérale en France.
Gabrielle est une femme transgenre de 50 ans. Elle a été placée en détention provisoire pendant un an à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis dans le cadre d’une information judiciaire. Alors que figure sur ses papiers d’identité la mention« sexe féminin », elle a été affectée dans le bâtiment des hommes, au sein d'une aile spécifique destinée aux femmes transgenres.
Le procès de Gabrielle n'ayant pas encore eu lieu, elle n'a pas souhaité évoquer les faits pour lesquels elle a été incarcérée.
Détenues est une série produite par Insider Podcast sous la direction d'Emilie Denètre et d'Adèle Humbert. 

Durée : 
15
min.
3.6.2021
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Gabrielle (1/3)

Nous vous proposons un éclairage d'Eva Goron, avocate pénaliste, surl'épisode que vous venez d'écouter :

La détention provisoire dans le cadre d’un dossier d’instruction

 

« Emmenée à Fleury-Mérogis pour une durée d’un an en détention préventive »

En quelques jours,Gabrielle a été interpellée, placée en garde à vue, mise en examen dans le cadre d’une information judiciaire criminelle puis placée en détention provisoire à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis. Un an plus tard, à l’occasion du débat contradictoire sur la prolongation de sa détention provisoire, le juge des libertés et de la détention a pris une ordonnance de contrôle judiciaire, permettants a remise en liberté.
À ce jour, Gabrielle demeure libre et présumée innocente, dans l’attente de son jugement.  

La fouille à nu à l’arrivée en prison

 

« J’arrive au bâtiment des femmes, et on va me demander de me déshabiller pour la fouille »
À leur arrivée, les personnes détenues sont fouillées intégralement avant d’être affectées en cellule d’attente.
La fouille« intégrale », également appelée fouille « à corps » ou« fouille à nu » consiste en une « une mise à nu de la personne détenue effectuée sans aucun contact physique entre la personne fouillée et l’agent chargé de procéder à la fouille. Elle s’accompagne du contrôle méticuleux des effets vestimentaires de la personne détenue.L’objectif principal de la fouille intégrale est de rechercher des objets ou substances interdits ou dangereux susceptibles d’échapper à une détection par matériels techniques ou à une fouille par palpation » (note du 14octobre 2016 relative au régime juridique encadrant certaines modalités de contrôle des personnes détenues).
Cette mesure attentatoire à la dignité est rendue systématique à l’admission en considération du contexte, à savoir la mise sous écrou d’une personne préalablement libre (circulaire du 15 juillet 2020).
Pour autant, les associations représentant les droits des détenu.e.s dénoncent régulièrement les conditions humiliantes et dégradantes dans lesquelles sont réalisées ces fouilles, se déroulant souvent dans des locaux vétustes et non isolés visuellement.
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L’affectation des détenues transgenres dans le bâtiment deshommes  

 

« Ma génitalité est masculine et ça, dans le milieu carcéral, c’est le critère unique »
Depuis la loi du 18novembre 2016, la modification de l’état civil d’une personne transgenre n’est plus subordonnée au changement irréversible de son apparence (c’est-à-dire à des traitements médicaux irréversibles, souvent synonymes de stérilisation).Cette condition avait en effet été jugée constitutive d’une violation du droit à la vie privée par la Cour européenne des droits de l’homme(arrêt A. P. Garçon et Nicot C. France).
Depuis l’entrée en vigueur de cette loi, une personne transgenre peut ainsi officiellement changer de genre sans passer par une chirurgie de réassignation sexuelle.  
Pour autant, l’administration pénitentiaire continue de prendre en considération la génitalité apparente des arrivantes transgenres pour les affecter dans le bâtiment des hommes ou dans celui réservé aux femmes, faisant fi de leurs démarches de changement de genre.
Plus surprenant encore au regard de l’état de droit, l’apparence « sexuelle » l’emporte parfois encore sur la nouvelle identité civile d’une personne transgenre à son arrivée en prison, comme ce fût le cas pour Gabrielle qui avait pourtant officiellement obtenu que la mention « sexe féminin » soit inscrite sur ses papiers depuis 2018, soit avant son incarcération.  
À la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis, elle a ainsi été conduite au sein du bâtiment réservé aux hommes, en raison de son sexe de naissance que la fouille à nu avait révélé.
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